Lady Yakuza



Imaginez. Une bakuto : une joueuse itinérante. Un fantasme, auprès de qui il serait beau de mourir. Un katana à la main, le kimono fendu et ensanglanté, un tigre rugissant dans le dos. Après avoir pu partager sa quête initiatique. Après avoir pu admirer son courage de lionne et sa grâce de gazelle, avoir pu contempler ses tragiques pivoines rouges qui ondulent sur son épaule.
Imaginez encore. Cheveux en liberté, la Pivoine Rouge parée d’un magnifique kimono noir et blanc, un tantô sanguignolant dans une main et un révolver fumant dans l’autre, qui vient de décimer un clan entier. Avant de régler son compte au chef dudit clan, le visage pur d’Oryu zébré d’un éclair. Un éclair signé Kato Tai. Aussi emblématique et saisissant que le plan de Seijun Suzuki qui, dans La vie d’un tatoué, montrait le kimono de son héros fendu par un sabre, dévoilant son tatouage dorsal représentant un tigre blanc.
Imaginez enfin. Après un deuil, trois regards qui, avec classe, décident d’affronter seuls une horde de yakuzas sans honneur. Pour sceller leur engagement, une chanson, l'hymne à Oryu, une élégie en vérité. Puis une barque, qui les conduit nonchalamment dans la nuit, et des flocons qui commencent à tomber sur les trois personnages, debouts. A l’issue d'un combat enragé, dans un quartier d’Osaka sous la neige, des dixaines de yakuzas en kimonos noirs, têtes inclinées et lanternes à la main, forment une haie d’honneur aux trois personnages en question : la légendaire Pivoine rouge, le  fantasque chef de clan Kumatora et le sans clan Kitahashi. Soit un très beau chant du cygne, signé Buichi Saito, l’admirable réalisateur du quatrième volet des Baby Cart.
Grâce à HK vidéo, éditant les huit films de la saga dans un bel écrin, il est désormais aisé de pouvoir arrêter d’imaginer.

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